Loi de modernisation de la Justice du 21ème siècle : la dénonciation des salariés par le chef d’entreprise

29 Déc 2016

Publiée le 19 novembre 2016, la loi de modernisation de la Justice du 21ème siècle en créant l’article L 121-6 du Code de la Route, impose à l’employeur de dénoncer ses salariés en cas d’infractions au code de la route commises avec des véhicules de société.

Que change ce nouveau texte et qu’impliquera-t-il, en pratique, pour les chefs d’entreprise?

  • Point sur l’ancienne législation

Lorsqu’un salarié au volant d’un véhicule de fonction, dont le certificat d’immatriculation était au nom de la société, commettait des infractions sans interception (ex : excès de vitesse constaté par le contrôle automatisé), l’avis de contravention était adressé au représentant légal  de la société.

Conformément à l’article L 121-2 du Code de la Route, le représentant légal voyait sa responsabilité pécuniaire engagée et ne pouvait être dédouané de cette amende civile qu’en établissant l’existence d’un cas de force majeure, ou en dénonçant son salarié.

Cette responsabilité financière pèsait à titre personnel sur le dirigeant.

En outre, si le chef d’entreprise payait la contravention sans dénoncer le salarié et sans adresser un courrier indiquant qu’il n’était pas le conducteur, cela pouvait être assimilé à une reconnaissance de culpabilité et entraîner une perte de points sur son permis de conduire.

Cependant, en pratique, il était fréquent que la décision de retrait ne soit pas mise à exécution, faute pour le fichier national des permis de conduire de faire lien entre la plaque minéralogique, la société, le dirigeant et son numéro de permis de conduire.

Pour s’éviter ces démarches d’identification de la tête dirigeante de l’entreprise lesquelles pouvant s’avérer coûteuse, eu égard à la masse d’avis de contravention générée par le contrôle automatisé, le législateur a préféré opter pour un système où elle contraint le chef d’entreprise à identifier l’auteur de l’infraction, sous peine de sanction.

  • La nouvelle obligation légale de dénonciation des salariés par le chef d’entreprise

L’article 34 de la loi de modernisation de la justice du XXIème siècle a crée l’article L121-6 du Code de la Route lequel dispose :

«  Lorsqu’une infraction constatée selon les modalités prévues à l’article L. 130-9 a été commise avec un véhicule dont le titulaire du certificat d’immatriculation est une personne morale ou qui est détenu par une personne morale, le représentant légal de cette personne morale doit indiquer, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception ou de façon dématérialisée, selon des modalités précisées par arrêté, dans un délai de quarante-cinq jours à compter de l’envoi ou de la remise de l’avis de contravention, à l’autorité mentionnée sur cet avis, l’identité et l’adresse de la personne physique qui conduisait ce véhicule, à moins qu’il n’établisse l’existence d’un vol, d’une usurpation de plaque d’immatriculation ou de tout autre événement de force majeure.

Le fait de contrevenir au présent article est puni de l’amende prévue pour les contraventions de la quatrième classe. »

A la lecture de ce texte, le chef d’entreprise va désormais être contraint de communiquer, par lettre RAR ou de façon dématérialisée, l’identité et l’adresse de la personne qui conduisait le véhicule, à moins qu’il n’établisse un vol, une usurpation de plaque d’immatriculation ou tout autre évènement de force majeure.

A défaut, le non-respect de cette obligation entraînera des poursuites du représentant légal de la société.

La sanction est une contravention de 4ème classe  pouvant aller jusqu’à 750 euros d’amende.

En résumé, le chef d’entreprise qui ne dénoncera pas l’auteur de l’infraction sera donc redevable pécuniairement de la contravention commise par le salarié mais également sanctionné, en sus par une contravention de 4ème classe pour non dénonciation de l’auteur de l’infraction.

Ce  nouveau dispositif est applicable depuis le 1er janvier 2017.

Ce système est particulièrement critiquable en ce sens que si l’entreprise met en place une procédure rigoureuse d’identification, le chef d’entreprise n’aura jamais la certitude que celui qui était en possession du véhicule est le véritable auteur de l’infraction ce qui laisse supposer certaines dérives…

Un arrêté publié le 15 décembre 2016 vient préciser les modalités pour transmettre la déclaration de dénonciation du salarié concerné par la verbalisation.

Le représentant légal pourra transmettre les informations soit par lettre RAR ou par internet sur le site www.antai.fr.

L’arrêté précise également les pièces devant être communiquées selon le mode d’envoi et les circonstances de l’infraction.

Ci-après l’arrêté:

https://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000033665815&dateTexte=&categorieLien=id

Un décret en date du 28 décembre 2016 est venu préciser la liste des infractions pouvant être constatées par les appareils de contrôle automatique et par l’intermédiaire de la vidéoprotection.

La liste des infractions a notamment été étendue  au non port de la ceinture de sécurité, l’usage du téléphone tenu en main, le franchissement et le chevauchement des lignes continues, l’obligation du port d’un casque homologué etc..

Ci-après le décret :

https://www.legifrance.gouv.fr/eli/decret/2016/12/28/INTS1629001D/jo

Pour toute demande d’information complémentaire, n’hésitez pas à contacter le Cabinet de Maître Ingrid ATTAL (01.47.20.22.67)